[Actu] Les actualités des sous-marins russes

Loin des événements de la guerre en Ukraine, la Marine Russe (VMF) poursuit sa modernisation avec la sortie en mer simultanée de plusieurs sous-marins nucléaires et conventionnels soit dans le cadre de formation des équipages soit dans le cadre des essais constructeurs/étatiques qui viennent marquer des étapes importantes dans le renouvellement de la composante sous-marine de la flotte russe.

Le contraste est d’ailleurs pour le moins saisissant entre la composante de surface et la composante sous-marine : là où la flotte de surface semble clairement à la peine en mer noire, la composante sous-marine semble donner « pleine et entière » satisfaction avec des tirs réguliers de missiles Kalibr-PL au départ des sous-marins conventionnels (SSK) Varshavyanka (Projet 636.3 Improved Kilo). En outre, profitant de la météo saisonnière pour le moins clémente en Mer Blanche et Mer de Barents, la Marine Russe ainsi que le Holding OSK procèdent actuellement aux essais constructeurs et étatiques de plusieurs bâtiments qui rejoindront le service actif entre la fin de l’année 2022 et la fin de 2023.

Entre navires neufs et sorties de rénovations et/ou révisions, quatre classes de sous-marins nucléaires ainsi qu’une classe de sous-marins conventionnels sont concernés par les essais en cours. La mise en service des navires en question ne révolutionnera pas fondamentalement les performances de la Marine Russe mais ces bâtiments confirment une tendance qui s’observe depuis quelques années maintenant: la bonne santé retrouvée du secteur de la construction navale russe dans le domaine des sous-marins (nucléaires et conventionnels) ainsi que la concrétisation de programmes longuement attendus.

Tour d’horizon.

  • K-132 Irkutsk & K-410 Smolensk (Projet 949A/AM Antey)

Vingt-cinq ans, c’est le temps qui se sera écoulé entre l’arrêt du sous-marins nucléaire lanceur de missiles de croisière (SSGN/APRK dans la classification russe) K-132 Irkutsk (Иркутск) et son retour en mer après avoir été porté au standard Projet 949AM. Mis en service le 30 décembre 1988, le K-132 Irkutsk est le troisième bâtiment de la classe Antey (Projet 949A Oscar II) qui débuta sa carrière au sein de la Flotte du Nord avant de rejoindre la Flotte du Pacifique en date du 29 octobre 1990, sa base d’attache étant située à Vilyuchinsk (Kamtchatka).

Le K-132 Irkutsk avant qu’il n’entre en modernisation. Image@?

Retiré du service et placé en réserve en attente d’une révision intermédiaire en novembre 1997 (soit un peu moins de sept années après son arrivée à Vilyuchinsk), le K-132 Irkutsk va être transféré au chantier naval DVZ Zvezda de Bolshoy Kamen en novembre 2001. Le navire va effectuer une courte sortie en mer en novembre 2001 pour vérifier l’ampleur des travaux de révision à effectuer sur le bâtiment avant que ce dernier ne soit stationné intact au chantier naval pendant… douze ans! C’est la signature d’un premier contrat en date du 5 avril 2013 entre le MoD russe et le chantier naval Zvezda suivi du contrat étatique portant la référence Р/1/2/0317/ГК-13-ДГОЗ et daté du 5 juillet 2013 qui vont lancer les travaux de modernisation de deux navires de la classe Antey: le K-132 Irkutsk et le K-442 Chelyabinsk: l’objectif étant de remettre au service un premier navire modernisé en 2017.

Sans rentrer en détails sur le contenu des travaux de modernisation, celui-ci ayant été abordé ici il y a plusieurs mois, signalons que le gros de l’effort porte sur le remplacement des équipements embarqués ainsi que sur le réarmement des navires avec substitution des missiles anti-navires de surface 3M45/P-700 Granit par l’installation de cellules « adaptées » pour l’emport des missiles Oniks/Kalibr et à terme Tsirkon. La dotation des navires refondus passant de vingt-quatre Granit à quarante-huit ou septante-deux (les sources sont discordantes sur le nombre final de missiles): cette refonte transformerait donc les Antey en véritables « camions à missiles » sous-marins aptes à frapper à la fois en mer et sur terre, apportant à ces derniers une polyvalence qui leur manquait tant qu’à présent.

Le K-442 Chelyabinsk durant sa première vie avant son entrée en modernisation; Image@?

Loin d’être une partie de plaisir, les travaux de modernisation vont – comme de coutume – connaître des retards, problèmes et autres « déplacements vers la droite » donc la construction navale russe semble être friande. Ainsi et « très discrètement » (contrairement aux habitudes russes), on apprend via la presse locale que le K-132 Irkutsk a repris la mer dans le cadre de ses essais constructeur (première étape des essais d’un navire après des travaux), son retour au service étant attendu à la fin de l’année 2023 au sein de la Flotte du Pacifique. Il se sera donc écoulé pas moins de neuf années entre la signature du contrat de modernisation et la première sortie en mer du navire… ce délai passant à dix ans si on prend en considération la date de retour au service (prévue) du navire.

Le (très long) délai des travaux risque fort probablement de signifier la fin de ce programme une fois que le K-442 Chelyabinsk sera porté au standard Projet 949AM, son retour au service étant envisagé à l’horizon 2025… délai qu’il faut envisager avec la plus grande réserve. Bien que l’idée dirigeant le projet 949AM soit bonne vu qu’elle permet d’exploiter le potentiel de navires n’ayant que peu navigué et disposant encore d’une durée de vie résiduelle importante, le (long) délai des travaux semble avoir été le clou final dans le cercueil de ce programme; il est d’ailleurs à noter que la modernisation d’un troisième bâtiment un temps envisagé ait été remisé aux calendres grecques. La modernisation porte sur des navires appartenant à la Flotte du Pacifique et avec l’arrivée sous peu (voir plus bas) de plusieurs SSGN Yasen-M, le besoin de prolonger les Antey en passant par une refonte en profondeur se justifie beaucoup moins qu’il y a 10 ou 15 ans. Il reste néanmoins à voir quelle décision prendra l’amirauté russe en ce qui concerne les derniers Antey: sachant que leur armement principal est en fin de vie et/ou d’une utilité concrète douteuse, l’absence de modernisation des navires restant pourrait signifier leur retrait de service définitif dans un horizon pas si lointain.

Le K-410 Smolensk (à gauche) en compagnie avec le – maintenant retiré du service – K-119 Voronezh. Image@?

L’autre nouvelle passée également relativement inaperçue, c’est une annonce effectuée par le MoD russe datée du 20 juin 2022 indiquant que le sous-marin K-410 Smolensk (Смоленск) a été employé en mer en collaboration avec le K-560 Severodvinsk (Projet 885/08850 Yasen) dans des exercices de tirs conjoints sur des cibles navales en Mer de Barents. Rien de surprenant à cette annonce à première vue, si ce n’est qu’elle confirme indirectement que le K-410 Smolensk qui n’était plus sorti en mer depuis 2019 a repris du service actif. Vu le délai depuis son dernier passage en révision ainsi que son inactivité d’environ trois ans, le navire a du bénéficier d’une révision intermédiaire (qui na pas reçu de couverture médiatique) pour lui permettre de retourner au service actif. La dotation en sous-marins Antey au sein de la Flotte du Nord est donc « remontée » à deux navires actifs: le K-266 Orel ainsi que le K-410 Smolensk.

  • K-329 Belgorod (Projet 09852)

Sous-marin nucléaire unique dans la dotation de la Marine Russe, le K-329 Belgorod (Белгород) appartient au Projet 09852 (construit sur base de la coque d’un SSGN 949A Antey): il s’agit d’un bâtiment de très grandes dimensions au sujet duquel on ne sait que peu de choses si ce n’est ce que les responsables russes ont bien voulu communiquer à son sujet ainsi qu’en recoupant des informations disponibles dans les appels d’offres russes.

Conçu pour emporter le drone sous-marin 2M39 Poseidon mais également pour déployer des petits sous-marins pouvant explorer les fonds marins ainsi que d’autres équipements de diverses natures: Le K-329 Belgorod sera exploité par le GUGI (Главное Управление Глубоководных Исследований Министерства обороны Российской Федерации) qui est une unité spécialisée rattachée directement au ministère de la défense russe. Après avoir effectué une première sortie en mer le 25 juin 2021, le navire est depuis entré dans la phase finale de ses essais étatiques qui se déroulent en Mer de Barents: indication que les essais sont à un stade avancé, le navire est déployé de concert avec le sous-marin nucléaire TK-208 Dmitriy Donskoy (Дмитрий Донской), le dernier SNLE du type Akula (Projet 941 Typhoon) toujours actif et n’étant plus employé que dans le cadre d’essais et exercices.

Le K-329 Belgorod lors d’une de ses premières sorties en mer. Image@CrazyMK / Airbase.ru

Et il ne se sera pas écoulé très longtemps entre les derniers essais observés et la mise en service puisque c’est en date du 8 juillet 2022 que le K-329 a été remis à la Marine Russe au chantier naval SevMash (Severodvinsk) en présence du Commandant-en-Chef de la Marine Russe, l’Amiral N.Yevmenov (Николай Анатольевич Евменов). Autre élément intéressant, qui n’est pas encore officiellement  confirmé, le K-329 Belgorod devrait rejoindre les effectifs de la Flotte du Pacifique : si cette information se vérifie, il s’agira d’une première dans l’histoire de la sous-marinade russe avec l’affectation d’un sous-marin relevant du GUGI sur le front Pacifique.

Il est intéressant (?) de constater que les images nettes du K-329 Belgorod ne manquaient pas avant le 24/02/2022. Image@CrazyMK / Airbase.ru

Dernier et non des moindres point qui n’est pas encore résolu, la question du drone 2M39 Poseidon et de sa mise en service. Si il est prescrit dans le cadre des essais constructeurs et étatiques d’un navire russe de tester l’entièreté de ses différents systèmes d’armes ainsi que de procéder au tir des armements embarqués pour permettre d’achever la campagne d’essais précédant la mise en service, sur base de ceci, on peut donc en conclure que la Russie a procédé au tir d’essais d’un drone 2M39 Poseidon.

Montage réalisé sur base de plusieurs photos permettant d’avoir un premier aperçu du 2M39 Poseidon et de ses dimensions imposantes. Image@Mil.ru

Or tant qu’à présent, rien ne permet NI d’affirmer NI d’infirmer qu’un tel tir ait eu lieu. Que peut-on (ou non) en conclure ? Que la Russie a admis au service le K-329 Belgorod ainsi que son système d’armes complet ? Que la Russie a admis au service le K-329 mais pas encore le 2M39 ? Ou enfin que la Russie souhaite communiquer a minima sur le tandem Belgorod/Poseidon ?

Autant le dire tout de go, il est impossible en l’état actuel des choses de répondre définitivement à cette question. Il est fort probable que le K-329 Belgorod soit utilisable pour une grande partie des missions qui lui sont attribuées avec un « flou volontaire » entretenu autour du Poseidon, il est vrai que les russes n’apprécient guère communiquer sur ce vecteur et son armement : à noter d’ailleurs que le communiqué de presse du chantier naval SevMash illustrant la mise en service du K-329 évite TRÈS soigneusement les images du navire en lui-même alors que de coutume, les images des navires sont nombreuses lors de leur mise en service. Pour éviter les regards « indiscrets » et éventuelles analyses sur base des images disponibles? Très probablement.

Cérémonie du premier levé de drapeau de la Marine Russe sur le K-329 Belgorod, concrétisant donc son admission au service. Image@SevMash.ru
  • K-571 Krasnoyarsk & K-573 Novosibirsk (Projet 885M/08851 Yasen-M)

Autres représentants de la nouvelle génération de sous-marins nucléaires entrant actuellement en service en Russie, les K-571 Krasnoyarsk (Красноярск) et K-573 Novosibirsk (Новосибирск) appartiennent à la classe de sous-marins polyvalents Yasen-M (Project 885M/08851). Ces deux navires qui sont respectivement les deuxième et troisième bâtiments de la classe Yasen-M viendront renforcer les effectifs de la Flotte du Pacifique.

Le K-573 Novosibirsk lors d’une de ses premières sorties en mer. Image@CrazyMK / Airbase.ru

Alors que le K-573 Novosibirsk a été admis au service en date du 21 décembre 2021, le navire n’a pas encore effectué sa transition inter-flottes entre la Flotte du Nord où il est temporairement détaché et la Flotte du Pacifique où il est affecté. Selon des informations récentes, le K-573 Novosibirsk va procéder à des essais de tirs de missiles Kalibr et Oniks à la fin du mois de juillet avant de prendre la route de Vilyuchinsk à la mi-août avec emprunt de la route maritime du nord. Il ne serait d’ailleurs pas du tout étonnant qu’il effectue sa transition vers le Pacifique en compagnie du K-329 Belgorod. L’arrivée du K-573 à Vilyuchinsk sera un évènement important dans l’histoire de la Flotte du Pacifique: il s’agira du premier sous-marin nucléaire d’attaque neuf livré à cette flotte en vingt-six ans (le dernier en date étant le K-150 Tomsk réceptionné en 1996)!

Le K-573 Novosibirsk à quai au chantier naval SevMash. Image@Oleg Kuleshov

L’autre information concerne le K-571 Krasnoyarsk, ce dernier qui a été lancé le 30 juillet 2021 est sorti en mer pour la première fois le 26 juin 2022, quittant le chantier naval SevMash pour se rendre en Mer Blanche. Cette sortie marque donc le début des essais constructeur du bâtiment, ces essais seront suivis par les essais étatiques et une fois ces derniers achevés le bâtiment sera admis au service. Les prévisions actuelles tablent sur une remise à la Marine en décembre 2022, le navire venant renforcer les effectifs de la Flotte du Pacifique où il rejoindra les rangs de la 10 DPL (10-я дивизия подводных лодок) en compagnie du K-573 Novosibirsk.

Même si la photo n’est guère de bonne qualité, il s’agit du K-571 Krasnoyarsk lors de sa première sortie en mer le 26 juin 2022. Image@виктор29рус / Airbase.ru
  • K-5xx Generalissimus Suvorov & K-5xxx Imperator Aleksandr III (Projet 955A/09552 Boreï-A)

Sixième bâtiment de la classe Boreï et troisième bâtiment de la classe Boreï-A (Projet 955A/09552), le K-5xx Generalissimus Suvorov (Генералиссимус Суворов) est un sous-marin nucléaire lanceurs d’engins (SNLE/RPKSN dans la classification russe) mis sur cale le 26 décembre 2014 au chantier naval SevMash.

Sorti du hall de production le 25 décembre 2021, le navire est lancé le 11 janvier 2022 ; sa mise en service devrait théoriquement intervenir en juillet 2023 au sein de la Flotte du Pacifique où il viendra renforcer les effectifs de la 25 DPL (25-я Краснознамённая дивизия подводных лодок), division à laquelle sont rattachés tous les SNLE appartenant à cette flotte.

Actuellement présent au chantier naval SevMash, le Generalissimus Suvorov est en cours de préparation active (équipage et matériel) pour se première sortie en mer qui devrait intervenir sous peu ; celle-ci lancera la campagne d’essais constructeurs avant de passer aux essais étatiques, ces derniers devant comprendre le tir d’un (ou plusieurs) missiles balistiques 3M30 Boulava avant son admission au service actif.

Une fois la mise en service du Generalissimus Suvorov effectuée, la composante sous-marine de la dissuasion nucléaire de la Flotte du Pacifique remontera à quatre SNLE en service (deux Boreï et deux Boreï-A), ce nombre étant appelé à augmenter rapidement puisque le K-5xx Imperator Aleksandr III (Император Александр III) doit – théoriquement ! – rejoindre les rangs de la Flotte du Pacifique à la fin de l’année 2023.

Les différents fanions présents lors de la mise sur cale de l’Imperator Aleksandr III. Image@Korabel.ru
  • B-871 Alrosa & B-588 Ufa (Projet 877V Paltus / Projet 636.3 Varshavyanka)

Seul représentant de sa classe, le B-871 Alrosa (Алроса) est un sous-marin d’attaque conventionnel (SSK) appartenant au Projet 877V. Admis au service le 1er décembre 1990, le B-871 Alrosa est une variante de la classe Paltus (Projet 877 Kilo) qui se distingue des autres représentant de sa classe par la présence d’un hydrojet pour sa propulsion au lieu d’une hélice à l’instar des autres unités de sa classe.

Le B-871 Alrosa dans un dock flottant à Sébastopol: on remarque bien son hydrojet. Image@?

Affecté à la Flotte de la Mer Noire au sein de la 4 OBRPL (4-я отдельная бригада подводных лодок) et basé à Sébastopol, le B-871 a pendant longtemps été le seul sous-marin affecté à la Flotte de la Mer Noire. Les effectifs de la composante sous-marine de la Mer Noire ont depuis été largement renouvelés et augmentés avec l’arrivée d’une série de six sous-marins conventionnels de la classe Varshavyanka (Projet 636.3) admis au service entre 2014 et 2016.

Arrêté pour révision depuis l’été 2014 et livré au chantier naval 13 SRZ de Sébastopol, les travaux vont se prolonger au-delà du raisonnable puisque le navire va être arrêté pendant 8 ans (!) pour ne sortir qu’à la fin de juin 2022 pour effectuer sa première sortie en mer post-travaux dans le cadre des essais constructeur, ces derniers sont toujours en cours en juillet 2022 et ont lieu en Mer Noire. Les projections originelles tablaient sur un retour au service du navire en 2015, mais ces projections ont été reculées à plusieurs reprises pour des raisons techniques et budgétaires. Néanmoins, point positif de cette révision, le navire a été modifié pour pouvoir tirer le missile Kalibr-PL au départ de ses tubes lance-torpilles de 533 mm.

L’Alrosa peu de temps avant la fin des travaux de révision de ce dernier. Image@кчф_ру

A noter également, dans la famille des SSK de la classe Kilo: la sortie en mer dans le cadre des essais constructeur du sous-marin B-588 Ufa (Уфа), bâtiment de la classe Varshavyanka (Projet 636.3 Improved Kilo) qui rejoindra la dotation de la Flotte du Pacifique au sein de la 19 BrPL (19-я бригада подводных лодок) à la fin de l’année 2022.

Le B-588 Ufa lors d’une sortie en mer. Image@Aleksey Akentyev

En conclusion

Déjà souligné auparavant, les différentes annonces sont indicatrices d’une construction navale russe qui retrouve – enfin ! – une certaine vitalité et principalement en ce qui concerne la composante sous-marine. De plus, élément important de cette vitalité, le renouvellement de la dotation de la Flotte du Pacifique qui va être la grande bénéficiaire des prochaines livraisons de navires actuellement aux essais : tous les navires cités ci-dessus, exception faite du B-871 Alrosa, rejoindront la dotation de cette Flotte entre la fin 2022 et la fin 2023 !

Autre élément significatif, la sortie de travaux du K-132 Irkutsk: celle-ci intervenant pas moins de 25 ans après sa mise en réserve suite à l’arrivée de la date limite de révision du navire… ce qui est très probablement un record absolu en la matière ! Mais, trêve de sarcasme, la première sortie en mer annonce à la fois la concrétisation du projet de modernisation au standard Projet 949AM longuement discuté qui voit les capacités opérationnelles de la classe Antey revue en profondeur tandis qu’il permet d’allonger la durée de navires qui n’ont été que peu utilisé et disposent donc encore d’un important potentiel. Même si le navire n’en est qu’aux débuts de ses essais constructeurs, son retour au service n’est pas à espérer avant fin 2023 et ce dans le cas où il n’y aurait pas de « mauvaises surprises » (dont la construction navale russe est souvent coutumière). Il n’empêche qu’avec une capacité d’emport théorique de quarante-huit (certaines sources font mention de septante-deux) missiles de croisière Oniks/Kalibr et à terme Tsirkon: les sous-marins portés à ce standard seront d’excellents « camions à missiles » sous-marins. Il reste maintenant à voir combien de temps il faudra au chantier naval DVZ Zvezda pour traiter un deuxième bâtiment de la sorte ainsi que les décisions de l’amirauté russe sur les suites éventuelles à donner à ce projet.

Fort probablement l’annonce récente la plus surprenante: l’affectation du K-329 Belgorod à la Flotte du Pacifique. Ce sous-marin spécial relevant du GUGI et construit sur base d’un SSGN inachevé de la classe Antey (Projet 949A) est en mesure de déployer le drone sous-marin 2M39 Poseidon (ex Status-6) tout comme il peut également servir de bâtiment-porteur pour des sous-marins plus petit tel que le Losharik. Alors qu’il était pour le moins logique de le voir affecté à la Flotte du Nord (proximité avec Severodvinsk ainsi que les infrastructures dédiées du GUGI), l’amirauté a décidé d’affecter ce dernier à la Flotte du Pacifique. Ce choix pour le moins surprenant à première vue peut se comprendre (un peu) par le fonctionnement des drones sous-marins Poseidon, ce dernier doit servir d’arme de frappe de deuxième ligne en visant des cibles côtières, vu que la Flotte du Pacifique a accès à toute la Côte Ouest des Etats-Unis, cette affectation est compréhensible. Après, vu que la dotation en bâtiments spécialisés du GUGI est en augmentation constante, il est logique de voir une partie de ces derniers affectés également à la Flotte du Pacifique et pas uniquement à la Flotte du Nord.

Les essais en mer en cours préfigurant le retour en service du B-871 Alrosa verra les effectifs de sous-marins de la Flotte de la Mer Noire monter à sept navires, tous étant désormais en mesure de tirer le missile Kalibr-PL pour les frappes terrestres. Vu l’usage régulier de ces navires pour des frappes sur des cibles en Ukraine, il y a fort à parier que le B-871 sera engagé dans le même but sous peu. De manière un peu cynique, on peut même souligner le fait que les sous-marins russes craignent beaucoup moins les missiles anti-navires ukrainiens Neptun et Harpoon que les navires de la flotte de surface russe.

Ces retours au service et essais en cours sont illustratifs d’une construction navale russe (principalement au niveau sous-marin) qui a retrouvé une vitalité et un rythme de production inconnus depuis la fin de l’URSS. Ce rythme est particulièrement significatif surtout lorsqu’on prend en compte le fait que les sous-marins nucléaires russes sont produits au sein d’un seul chantier naval (SevMash). Avec trois sous-marins (Krasnoyarsk, Belgorod et Generalissimus Suvorov) aux essais ou en préparation pour essais, SevMash se révèle donc en mesure de gérer les essais de trois bâtiments (dont un est pour le moins atypique et complexe, le Belgorod) : on appréhende mieux le niveau d’efficacité retrouvé par ce chantier naval.

L’entrée en vigueur des sanctions décrétées contre la Russie impacteront la construction navale russe (et par extension, l’ensemble de l’outil productif local), même si la construction des sous-marins nucléaires semble avoir été relativement « sanctuarisée » depuis 2014 bénéficiant de la priorité dans les programmes de substitution des équipements embarqués : on ne peut qu’être surpris par l’absurdité (du point de vue des russes) de l’attaque sur l’Ukraine et surtout par le calendrier de celle-ci, la Marine Russe ainsi que l’ensemble des forces militaires russe se seraient retrouvés dans une bien meilleure position endéans les cinq années à venir et ce en l’absence des sanctions supplémentaires contre le pays. Et même si les responsables russes semblent vouloir jouer la carte « business as usual » en ce qui concerne la gouvernance du pays, allant même jusqu’à laisser apparaître dans la presse locale que la construction de deux unités Boreï-A et Yasen-M supplémentaires est sur la table, il reste maintenant à voir si le chantier naval SevMash sera effectivement en mesure d’assurer une telle construction dans le contexte actuel et futur. Rien n’est moins sûr.

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