[Actu] Essais de l’ICBM RS-28 Sarmat

L’actualité de ces dernières semaines en Russie a régulièrement abordé la question de la mise au point de nouveaux missiles balistiques et de nouveaux missiles intercontinentaux. Si certaines déclarations relèvent toujours du « wishful thinking » et/ou des concepts intéressants mais toujours sur la planche à dessin; il est un projet qui est entré dans la phase des tests préliminaires indiquant donc que le projet est à un stade de développement avancé. Il s’agit du RS-28 Sarmat.

La dissuasion nucléaire russe repose sur une triade classique et inchangée depuis l’époque soviétique: bombardiers stratégiques avec emport de missiles à tête nucléaires, sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) et enfin les missiles balistiques intercontinentaux.

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La personne se tenant à côté de ce RS-28 permet de se faire une idée de la taille du missile… Photo@kackad.com

Les missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) sont de deux types soit mobiles, dans quel cas ils sont montés sur un véhicule assurant le transport et le lancement (TEL) soit ils sont montés en silos. La Russie dispose en matière de missiles montés en silos de plusieurs modèles: le RS-24 Yars, l’UR-100UTTKh, le RT-2PM2 « Topol-M » et enfin le R-36M2. Il est à noter que certains de ces missiles peuvent également être employés en version « mobile ».

Le R-36M2 Воевода (nom de code OTAN SS-18 mod.5 Satan) est un missile balistique intercontinental qui peut être classé dans la catégorie des « missiles lourds »; en effet il présente une masse au décollage de 211 tonnes et est un missile dit « mirvé » ce qui signifie qu’il dispose de plusieurs têtes indépendantes (dix têtes d’une mégatonne pour être précis) capables de frapper des cibles différentes. L’armée russe a récupéré environ 300 missiles R-36M (et variantes) à la chute de l’URSS et les estimations indiquent qu’en 2017, il reste 46 R-36M2 en service répartis sur deux sites; Yasny (Oblast d’Orenburg) et Uzhur-4 (Kraï de Krasnoyarsk).

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Missile R-36M2 exposé en monument. Photo@wikipedia.com

La Russie s’est retrouvée avec un problème de taille en ce qui concerne le R-36M2: en effet, ce dernier a été dessiné (par Yuzhnoye), mis au point et produit en Ukraine (par Yuzmash). Si cette production ne posait pas de problèmes durant l’époque soviétique, il n’en va plus de même depuis l’annexion de la Crimée et la crise politique entre l’Ukraine et la Russie qui en découle. C’est pourquoi la Russie a lancé en 2009 les études relatives à un nouvel ICBM lourd prévu pour prendre la relève en priorité des R-36M2 ainsi que des UR-100UTTKh (dans le cas de ces derniers, le remplacement se justifie par l’atteinte de la fin de la vie active du missile).

Confié au bureau d’études Makeyev, le nouveau missile a reçu la dénomination RS-28 Sarmat. D’un point de vue technique, le missile présente les caractéristiques suivantes:

  • Missile à deux étages
  • Missile « Mirvé » (possibilité d’emport modulable allant de 10 à 24 têtes)
  • Carburant liquide
  • Masse au décollage: 220 tonnes
  • Charge offensive: 10 tonnes
  • Portée: 11.000 Km
  • Vitesse maximale: Mach 20,7
  • Guidage: Glonass, centrale inertielle, guidage inertiel avec recalage par visée stellaire
  • Erreur Circulaire Probable (CEP): 10 m
  • Moteurs du premier étage: PDU-99

Comme tout programme russe contemporain qui se respecte, le RS-28 Sarmat a connu des retards, et il faudra attendre le 10 août 2016 que pour assister aux premiers tests des moteurs PDU-99 du premier étage du missile. En octobre 2016, les premières du missile fuiteront dans la presse, permettant de se faire une meilleure idée de l’aspect pour le moins massif du missile.

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Photo du deuxième test d’éjection à froid documenté du RS-28. Photo@Rossiya24

Finalement, c’est en décembre 2017 que le premier essai d’éjection du missile hors de son silo a été réalisé; ceci ayant pour but de valider la méthode employée pour le lancement du missile. C’est le concept « d’éjection à froid » qui est employé; du gaz à haute pression étant employé pour faire sortir le missile du silo et une fois ce dernier à environ 25m d’altitude, le cache de protection des moteurs du premier étage est éjecté latéralement (de manière à ne pas être expulsé, avec les risques liés, en direction du silo) avant allumage des moteurs du missile. Ce système permet notamment une recharge rapide du silo après tir d’un RS-28.

Lors d’une conférence de presse tenue le 1er mars 2018, le Président Russe fit savoir que les tests étatiques du RS-28 sont en cours depuis décembre 2017 à Plesetsk au départ d’un silo modifié pour accueillir le RS-28. Et c’est le 29 mars que le MoD Russe a publié une vidéo montrant le deuxième test d’éjection du missile et ce toujours à Plesetsk.

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RS-28 lors de son premier test d’éjection à froid. Photo@armyrecognition.com

Selon les déclarations les plus récentes; la production en série du RS-28 doit débuter dès 2020 avec une entrée en service d’abord à Uzhur-4 et ce dès 2021. La carrière opérationnelle des R-36M2 est prévue pour s’achever à l’horizon 2024 bien qu’il semble que les missiles puissent jouer les prolongations le temps d’achever la conversion des unités.

Nous reviendrons sur le Sarmat ainsi que ses homologues Topol et Yars dans un dossier relatif aux forces stratégiques russes d’ici quelques semaines.

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