[Dossier] Le 72 AvB: l’aéronavale de la Baltique
La Marine Russe et son aéronavale sont divisées en plusieurs régions; ces dernières ayant chacune une zone d’action bien précise. On dénombre les flottes et flottilles suivantes:
- Flotte de la Baltique
- Flotte de la Mer Noire
- Flotte du Nord
- Flotte du Pacifique
- Flottille de la Caspienne
Ces flottes relèvent toutes d’un commandement général basé à Saint-Pétersbourg qui travaille avec des commandements régionaux pour chacune des flottes.

En outre, la Marine Russe dispose également d’une branche aéronavale dont les missions principales sont:
- Assurer la défense des bases de la Marine,
- Assurer la protection de la flotte en mer,
- Assurer la défense des espaces maritimes russes,
- Assurer la lutte anti navires de surface et anti sous-marine
- Assurer la protection des installations stratégiques implantées dans leur zone d’action
La Marine Russe et son aéronavale contemporaine sont les descendantes directes de la Marine Soviétique dont elles ont pris le relais en 1991. Vu les changements politiques et économiques connus par la Russie: la Marine Russe contemporaine n’est que l’ombre de ce qu’elle fut à l’époque de la guerre froide.
Les changements géopolitiques récents ainsi que la montée des tensions entre la Russie et les pays de l’OTAN ont eu un impact non-négligeable sur l’aéronavale Russe. Et c’est la Flotte de la Baltique basée à Kaliningrad qui est la plus exposée dans ce contexte de tensions croissantes.
L’enclave de Kaliningrad est un territoire de 15.100 Km² appartenant à la Russie et situé entre la Pologne et la Lituanie. Il n’y a pas de lien territorial entre la Russie et l’enclave. Constituant l’Oblast de Kaliningrad avec la ville de Kaliningrad (anciennement Königsberg) en tant que capitale; la population totale de cet Oblast est d’environ 980.000 habitants (en 2016).

Présentant un accès à la Mer Baltique libre des glaces toute l’année et idéalement situé au sein du dispositif de l’OTAN; cette zone est stratégiquement très intéressante. L’URSS et la Russie ne s’y sont pas trompés en maintenant un important ensemble d’installations militaires et un arsenal conséquent sur ce territoire.
C’est à Kaliningrad qu’est établi le commandement de la branche locale de la Marine Russe qui est en charge de cette région: la Flotte de la Baltique. Celle-ci dispose d’une branche aéronavale qui, malgré un équipement vieillissant, se retrouve en première ligne et est certainement une des branches les plus actives de l’Armée Russe depuis plusieurs mois.
Des annonces très récentes de montée en puissance des capacités de l’aéronavale de la Flotte de la Baltique sont donc l’occasion de se pencher sur cette branche médiatiquement très exposée.
L’Aéronavale de la Flotte de la Baltique: état des lieux
Faisant partie du District Ouest de l’Armée Russe (6ème armée de l’air), l’aéronavale de la Baltique est composé d’une seule unité: le 72 AvB (72-я гвардейская авиационная Новгородско-Клайпедская Краснознамённая имени маршала авиации И.И. Борзова база) des VMF (Marine Russe).
Cette unité, fondée en date du 15 décembre 2012, a pris progressivement la relève des unités 7052 AvB, 7053 AvB et 7054 AvB des VMF. Ces unités étant elles-mêmes issues des anciennes unités héritées de l’époque Soviétique.

L’Aéronavale, à l’instar de la Force Aérienne, est passée par plusieurs phases de modifications structurelles et organisationnelles qui ont vu la disparition des anciennes unités, le transfert des appareils d’une base à une autre et une renumérotation des appareils: le sujet est tellement vaste qu’il nécessitera un article à lui seul.
Toujours est-il que l’aéronavale de la Baltique est structurée autour du 72 AvB depuis fin 2012 et que cette situation est toujours celle qui prévaut aujourd’hui. Au niveau des bases en activité dans l’Oblast, on en dénombre quatre:
- Chernyakhovsk (ex 7052 AvB)
- Chkalovsk (ex 7054 AvB)
- Donskoye (ex 396 OKPVE)
- Khrabrovo (ex 7053 AvB)

Le « centre nerveux » du 72 AvB est la base de Chkalovsk; cette base connaît actuellement d’importants travaux de rénovation/reconstruction depuis 2013, ces derniers devant normalement s’achever en 2018. Une fois les travaux achevés, la base de Chkalovsk deviendra le nouveau centre nerveux regroupant le gros des forces aériennes stationnées dans l’enclave de Kaliningrad. Durant cette rénovation, l’ensemble des appareils de Chkalovsk ont été déménagés sur la base de Chernyakhovsk.

La base de Khrabrovo se charge principalement de l’hébergement de la flotte de transport tandis que les hélicoptères d’attaques et de lutte anti sous-marine sont basés sur la base de Donskoye. L’affectation des hélicoptères sur cette base est des plus logique vu que cette base est la plus proche des côtes de la Mer Baltique.
La dotation du 72 AvB est constituée de plusieurs sous-unités avec des missions bien spécifiques;
- L’escadron de chasse
- L’escadron d’attaque au sol/mer
- L’escadron de recherche et sauvetage en mer et de lutte anti sous-marine
- L’escadron des hélicoptères d’attaque
- L’escadron des UAV
- L’escadron de transport
L’escadron de chasse basé à Chkalovsk est doté de 10 Su-27P issus de l’ancien 689 IAP et de 3 Su-27UB; ces appareils ont en charge les missions de QRA (Quick Reaction Alert), d’interception et de couverture des menaces aériennes. Vu qu’il s’agit encore de Su-27 de première génération, ces appareils n’ont aucune capacité air-sol et sont donc cantonnés aux missions air-air.

Les Su-27P/UB ont été littéralement « usés jusqu’à la corde » en attendant une révision générale sans cesse repoussée et c’est l’augmentation des interceptions qui a poussé la Russie à envoyer en urgence les appareils chez 20 ARZ à Pushkin près de Saint-Pétersbourg.
Dans le cadre de ces révisions générales, les appareils ont été renumérotés et forment maintenant un ensemble cohérent d’appareils facilement identifiables. La révision générale octroyée aux appareils leur rend un potentiel d’heures de vol mais ils n’ont bénéficiés d’aucune modernisation qui leur aurait apporté des capacités offensives et défensives accrues.

L’escadron d’attaque au sol/mer basé à Chernyakhovsk est composé d’un mélange de 10 Su-24M et de 6 Su-30SM dont le rôle principal est d’assurer la couverture et la destruction des menaces maritimes et/ou terrestres qui viseraient les installations stratégiques implantées dans l’enclave de Kaliningrad.

Confronté à la même situation, bien que moins critique, que l’escadron de chasse: les 10 Su-24M en dotation ont été envoyés en révision générale afin de leur rendre un potentiel suffisant pour suivre le nouveau tempo opérationnel. En outre, les VMF ont lancé l’acquisition de Su-30SM pour renforcer (et par la suite renouveler) sa flotte de bombardiers tactiques à disposition. Ce sont donc pas moins de 6 Su-30SM qui ont rejoint l’escadrille entre la fin de 2016 et le mois d’août 2017.

Les Su-24M étant des bombardiers tactiques dotés d’équipements vieillissants, l’arrivée d’appareils polyvalents et modernes tels que les Su-30SM permet au 72 AvB d’offrir une capacité offensive et opérationnelle sans commune mesure avec celle offerte antérieurement.
L’escadron des hélicoptères d’attaque, l’escadron des hélicoptères de secours et de recherche en mer et l’escadron de lutte anti sous-marine sont basés à Donskoye. Cette base qui est la plus proche des côtes se trouve à la pointe nord-ouest de l’enclave et permet aux appareils stationnés d’être au plus proche de leur zone d’action.

Composé d’un mélange de 5 Ka-27PL assurant la lutte anti sous-marine ainsi que de 4 Ka-27PS assurant le secours en mer et d’un Ka-27Ye de détection d’armes nucléaires; cette branche est celle qui se trouvait dans le « moins mauvais » état lors de la remontée en charge des interceptions. Cette situation étant facilement compréhensible vu l’importance de disposer d’appareils capables d’assurer la détection et la lutte anti sous-marine ainsi que le secours en mer dans cette zone connaissant un trafic intense. Un programme de révisions générales fut quand même rapidement enclenché en vue de disposer d’appareils ayant un potentiel suffisant pour assurer les besoins opérationnels.

Les hélicoptères d’attaque ne pouvaient pas se targuer du même bon état général… En effet, composé de 8 Mi-24VP et d’un ensemble hétéroclite de 4 Mi-8MT/TP/MTV/PS basés à Chkalovsk: les appareils étaient vieillissants et loin d’être de dernier cri. A cela s’ajoutait le retard pris dans les révisions générales des appareils qui eurent comme conséquence que seuls deux Mi-24VP et un Mi-8PS-9 étaient disponibles en 2013!

Encore une fois, la Russie envoya de toute urgence les appareils en révision générale chez 150 ARZ à Lyublino (dans l’enclave de Kaliningrad) permettant de disposer de l’intégralité de la dotation d’hélicoptères. Un Mi-24VP est maintenu en alerte QRA permanente à Chernyakhovsk pour pouvoir prendre en charge les cibles aériennes lentes et volant bas que les Su-27P sont incapables de traiter.

Et enfin, les deux derniers escadrons sont l’escadron de transport qui dispose pour assurer ces missions de 5 An-26 basé à Khrabrovo de plus, un Tu-134A-3 est employé pour le transport de l’état-major du 72 AvB. L’escadron des drones boucle ce tour d’horizon. Il est doté de deux UWCA Forpost et est basé à Chernyakhovsk. L’UWCA Forpost est en réalité un drone de recherche et de surveillance IAI Searcher Mk II conçu en Israël et assemblé en Russie.

Cet aperçu doit être nuancé par le fait qu’outre les équipements aériens à disposition de la Marine Russe, il y a bien évidemment un ensemble d’installations défensives au sol qui viennent compléter le parc aéronautique et qui sont à même de traiter un partie des menaces rencontrées. Mais ces équipements sortent du cadre de ce dossier.
L’Aéronavale de la Baltique; à la croisée des chemins?
La relance à l’aube des années 2000 des investissements dans l’armée a concerné en priorité les forces aériennes, l’aéronavale semblant être la grande oubliée de cette manne budgétaire. Assez étonnement malgré le côté stratégique de la zone, l’aéronavale de la Baltique fut pendant longtemps la grande oubliée des programmes de modernisation.

Au début de la décennie 2010, l’armée russe commença à recevoir de nouveaux appareils et disposa enfin des budgets pour entraîner ses pilotes et maintenir leurs compétences. La force aérienne russe qui venait de passer presque 10 ans clouée au sol (ou tout du moins n’étant capable que d’assurer le minimum syndical) recommença les entraînements réguliers de ses pilotes, relança les patrouilles en mer, remis en place une couverture cohérente de son espace aérien, de ses voies maritimes et bien évidemment de sa flotte de guerre. Les autres branches de l’armée russe furent également concernées par ce retour des budgets et il ne fallut pas longtemps pour revoir les navires de la Marine Russe recommencer les sorties régulières en mer; de plus des exercices interarmées de grande ampleur furent organisés dans l’enclave.
Le retour des patrouilles aériennes en mer Baltique avait trois objectifs:
- Assurer la couverture aérienne de la Marine
- Protéger les routes maritimes marchandes
- Tester les temps de réaction des pays membres de l’OTAN avoisinant l’enclave
Toute chose entraînant une autre, l’OTAN s’inquiéta de ce retour régulier des appareils russes aussi près des pays Baltes et de la Scandinavie ce qui entraîna une forte augmentation des décollages en alerte des appareils affectés à la BAP¹ (Baltic Air Policing). Par conséquent, les vols d’appareils de lutte anti sous-marine, d’appareils d’alerte radar avancée (AWACS), les appareils de renseignements (ELINT), etc… de l’OTAN s’accrurent en Baltique avec comme conséquence le besoin pour la Russie de disposer d’appareils capables de les intercepter le cas échéant.

Cette augmentation graduelle de la tension entre la Russie et l’OTAN va mettre en lumière le décalage flagrant entre la posture politique adoptée et les moyens réellement affectés pour maintenir cette posture; et c’est la situation de l’Aéronavale de la Baltique qui va mettre pleinement en lumière ce contraste.
Le 72 AvB était dans une situation particulièrement critique à cette époque, doté d’un équipement vieillissant et à bout de souffle ainsi que d’équipages en nombre limité: la gestion quotidienne des QRA (Quick Reaction Alert) s’avéra être un casse-tête de tous les instants vu l’absence d’équipements disponibles et d’équipages entraînés et aptes à assurer ces missions.

En outre, les travaux de reconstruction de la base de Chkalovsk ont compliqué fortement l’emploi des appareils; ces derniers étant tous temporairement déplacés à Chernyakhovsk dans des installations pour le moins inadaptées et en fin de vie. De plus, celles-ci n’étaient pas prévues pour la réalisation des missions de QRA.
Comme abordé auparavant, l’Aéronavale de la Baltique dispose de deux escadrons principaux: l’escadron de chasse équipé de Su-27P/Su-27UB chargé des missions de QRA et d’interception tandis que l’escadron chargé des mission d’attaque au sol est équipé de Su-24M et Su-30SM.
C’est un doux euphémisme d’écrire que la modernisation de l’Aéronavale Russe n’a pas été une priorité pour l’Etat Russe. En effet, les besoins de renouvellement au sein de la Force Aérienne étaient tellement importants que les besoins de l’Aéronavale ont été complètement négligés. L’annexion de la Crimée et d’une partie de l’Ukraine et l’augmentation significative des vols au sein de la Mer Baltique à proximité des installations militaires russes de Kaliningrad ont mis en lumière l’état d’obsolescence de l’Aéronavale Russe.
Pour donner une idée de l’âge du parc disponible; les derniers Su-24 actifs en Russie le furent au sein de l’Aéronavale et ne quittèrent le service actif qu’au 1er septembre 2016! Alors que beaucoup d’observateurs pensaient que le Su-34 serait employé pour assurer le remplacement des Su-24(M) des VMF, finalement c’est le Su-30SM qui fut sélectionné pour assurer le rajeunissement du parc de la Marine.

Bien qu’étant à la base un appareil polyvalent, le Su-30SM est devenu le nouveau « standard » en matière d’appareil moderne au sein de la force aérienne Russe; moins onéreux et plus polyvalent que le Su-35S, moins spécialisé qu’un Su-34, le Su-30SM est capable d’assurer un large éventail de missions qui convient parfaitement aux besoins de la Marine. De plus, au vu des déclarations de plusieurs hauts responsables de la Marine, il semble que le Su-30SM assurera le remplacement des Su-24(M) en priorité mais qu’à terme il prendra également la relève des Su-27P. La polyvalence de l’appareil permettra de standardiser les flottes et d’augmenter l’efficacité des équipages; le tout pour un coût moindre qu’actuellement.
La Marine Russe dispose actuellement de 28 Su-30SM en commande (3 commandes passées respectivement en décembre 2013, septembre 2014 et septembre 2015) dont pas moins de 20 appareils sont déjà en service. A terme, la Marine envisage de passer une commande supplémentaire pour arriver à 50 appareils en service. Un tel nombre ne permettra pas de renouveler intégralement la flotte de Su-24M/Su-27P mais elle apportera déjà un gros coup de jeune au parc disponible.
En ce qui concerne l’aéronavale de la Baltique; l’arrivée du premier Su-30SM le 10 décembre 2016 a marqué le début du renouvellement de la flotte locale. Il s’agit du premier appareil neuf reçu dans cette région depuis pas moins de 27 ans (!), c’est dire l’importance de cette livraison. Il sera rapidement suivi par 5 autres exemplaires livrés en mai et août 2017. Ces six Su-30SM couplés à la petite dizaine de Su-24M passés en révision générale; la branche « attaque au sol/mer » du 72 AvB a récupéré une grande disponibilité qui lui faisait défaut dans un passé récent.

Dans un avenir proche, il se confirme que la suite des livraisons de Su-30SM porteront sur 6 exemplaires supplémentaires permettant donc de constituer une escadrille complète; une fois ceci réalisé, la branche « attaque au sol/mer » sera stabilisée avec une escadrille de Su-24M et une escadrille de Su-30SM.
Au niveau de l’escadrille « de chasse », aucun remplacement des Su-27P n’est acté dans un premier temps. Cependant avec des appareils fort sollicités n’ayant bénéficiés d’aucune modernisation (à l’instar des Su-27SM/SM3) et ayant déjà 27 ans au compteur; la question de leur remplacement va être de plus en plus prioritaire. Surtout au vu du fait que leur usage est important et que les autres escadrons environnants de la force aérienne ont tous reçus des appareils modernes. Certes le projet, déjà discuté auparavant, est d’employer le Su-30SM pour également assurer le remplacement des Su-27P mais tant qu’à présent le nombre d’appareils commandé et celui envisagé ne permettent aucunement d’atteindre cet objectif à moyen terme.
Les Su-27P du 72 AvB ont encore de beaux jours devant eux; il est quand même assez curieux de voir que des unités beaucoup moins sollicitées et disposant d’appareils beaucoup plus modernes que des Su-27P ont vu leur effectifs renouvelés tandis que l’escadrille de chasse de l’aéronavale de la Baltique continue à voler sur des Su-27P « révisés ». Cependant, on constate quand même que malgré ces équipements vieillissants, les missions de QRA sont toujours assurées et que le ciel local reste surveillé de près par les forces en présence.

En outre, il faut prendre en considération un autre problème relatif aux Su-27P/UB ; leur disponibilité en faible nombre. Avec un tempo d’interventions élevé, les nécessités de la maintenance et les entraînements font que les appareils employés sont soumis à un vieillissement accéléré. La période entourant la tenue de l’exercice ZAPAD 2017 a vu une forte augmentation des interceptions réalisées par les Su-27P/UB et si la tendance est à une accalmie (toute relative), il ne faut pas espérer une diminution de la pression sur ces appareils.
La création d’une deuxième escadrille d’interception serait à la fois un plus pour les capacités opérationnelles mais également pour la préservation du matériel disponible. Cette éventualité a déjà été soulevée par la Marine et la réouverture proche de la base de Chkalovsk disposait de vastes parking permet de voir que cette option a été prise en compte par les décideurs de la Marine. Des rumeurs récentes parlent de la reprise de Su-27SM libérés par les arrivées de Su-35S dans l’ouest de la Russie pour créer cette deuxième escadrille mais il n’y a rien de concret pour l’instant.
D’un point de vue des hélicoptères, encore une fois la situation est assez paradoxale: lorsque la question des interceptions régulières est redevenue d’actualité, la situation n’était pas brillante: on ne dénombrait en 2014 que deux Mi-24VP et un Mi-8PS-9 (variante de transport) en état de vol! Inutile de dire que cette « force » n’en portait que le nom…

Grâce aux différents programmes de révisions des cellules lancés en urgence dès 2013-2014 ; les effectifs et la disponibilité des appareils ont été rétablis. Il reste quand même que toujours actuellement la flotte d’hélicoptères d’attaque est vieillissante et n’a pas non plus bénéficié d’un programme de modernisation des équipements. Une annonce récente, bien que démentie entre-temps, parlait de la livraison de Ka-52 et Mi-28N pour la Marine Russe notamment en vue d’équiper l’aéronavale de la Baltique. Même si cette information a été démentie, il est hautement probable qu’à court terme on voit arriver de nouveaux équipements une fois que la rénovation de la base de Chkalovsk sera achevée.
Comparativement, la situation des Ka-27PS/PL est la plus confortable. Le programme de modernisation de cet appareil est sérieusement retardée et commence seulement à atteindre sa vitesse de croisière avec le passage au standard Ka-27M. Bref, les appareils de ce type en service au sein du 72 AvB sont globalement dans le même état que ceux des autres unités. On peut même ajouter qu’ayant reçu une révision générale récemment, ils disposent d’un potentiel plus important que leurs homologues des autres unités de la Marine.

Le passage des appareils disponibles au standard Ka-27M ne fait guère de doute à terme; reste à voir si le 72 AvB sera équipé en priorité ou non. Vu l’accélération du rythme de modernisation, il ne faudra certainement pas patienter longtemps pour voir ces derniers y passer également.
La situation des drones va certainement rester stable dans les années à venir, vu qu’il n’y a pas de commandes en cours pour des Forpost supplémentaires. Cependant, vu que ce sont les seuls « appareils » capables d’assurer des missions de renseignements et d’espionnage dans l’enclave: un renforcement de cette capacité va s’imposer. Reste à voir quelle forme ce renforcement prendra: drone ou appareils spécialisés?
Et enfin, au niveau de la capacité de transport; si ce n’est un remplacement à court-terme du Tu-134A-3 et à moyen-terme des An-26 (par des IL-112V?); il ne faut pas s’attendre à des changements fondamentaux de ce point de vue.

Les images les plus récentes de la base de Chkalovsk qui approche de la fin des travaux de rénovation permettent de voir une grande capacité de stockage d’appareils et même si cette capacité s’explique par la concentration des appareils dans lesdites installations; c’est également une excellente indication d’un accroissement du nombre des escadrilles qui y seront basées dans les mois/années à venir.

En conclusion
On l’a vu tout au long de cet article, l’aéronavale de la Baltique se trouve actuellement à la croisée des chemins. Engagée dans un processus de remontée en puissance qui s’accompagne d’un programme de modernisation de ses installations et de ses équipements tout en étant soumise à un rythme opérationnel important.
Il serait presque amusant de dire que l’Aéronavale de la Baltique revient de loin: elle est pourtant passée d’un état de quasi mort-subite en 2010 à un état de première alerte dès 2013-2014 et elle dispose actuellement des équipages parmi les mieux entraînés de Russie. En effet, certains mois les pilotes du 72 AvB atteignent les 40 heures de vol… Ce qui, comparativement à la moyenne des pilotes Russes, est énorme; les estimations moyennes tablent sur 100 à 150 heures de vol annuelles (elles varient en fonction des régiments) pour les pilotes des VKS!

Vu l’ampleur de la tâche qui leur est confiée et vu l’importance stratégique de l’enclave de Kaliningrad: il y a fort à parier que le rôle de l’Aéronavale de la Baltique va aller croissant dans les années à venir. Face à l’OTAN qui ne lâche pas une once de terrain et avec une Russie qui remilitarise/modernise ses installations à disposition dans la région; le travail ne va pas manquer pour les pilote de Chkalovsk. Ils bénéficient heureusement du « renfort » de plusieurs bases des VKS localisées dans les environs et disposant d’appareils modernes.
Reste à espérer que malgré les comportements considérés comme « agressifs » de la part des deux parties en présence, ce jeu du chat et de la souris ne tournera pas mal. Vu les tensions existantes, il ne faudrait pas grand chose pour rapidement créer un incident aux conséquences potentiellement catastrophiques dans cette région. Le moindre événement peut vite mener à une escalade des tensions dans la zone; on l’a vu avec les passages à très basse altitude d’un Su-24M au-dessus de l’USS Donald Cook en avril 2016 et avec l’annonce du déploiement d’une batterie de S-400, de batteries de K300P Bastion-P et d’Iskander-M au sein de l’enclave et les crispations diplomatiques qui s’en sont suivies.

Toujours est-il que les « risques » mis de côté, il est un fait que l’Aéronavale de la Baltique est entrée dans une phase active de modernisation qui va se poursuivre et qui impliquera la réception de matériels (neufs ou modernisés) supplémentaires aptes à maintenir un haut niveau de disponibilité opérationnelle et permettant de remplir les principales missions qui sont attribuées au 72 AvB.
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¹Le Baltic Air Policing (BAP) est une des missions de l’OTAN qui consiste à assurer le QRA (Quick Reaction Alert) au-dessus des Pays Baltes (Estonie, Lettonie, Lituanie). Ces trois pays ne disposant pas d’une aviation de chasse, ce sont les pays membres de l’OTAN qui assurent la couverture aérienne avec changement du pays tous les trois mois.
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